LES FRÈRES DES ÉCOLES CHRÉTIENNES À HÉROUVILLE
LE PETIT LOURDES
HISTORIQUE DU NOVICIAT DU DISTRICT DE CAEN ( 1812-19O5 )
Chapitre 1er : Les Frères à Caen avant la Révolution.
Nous ne sommes pas bien fixés sur la date exacte de l'arrivée des Frères à Caen, avant la révolution française.
Des documents de valeur nous apprennent que, en 1728, trois Frères arrivèrent à Caen pour prendre la direction d'une école gratuite, tenue par les sieurs Daviot, pour l'instruction chrétienne des enfants pauvres de la paroisse Saint-Gilles, et que, en 1730, ils auraient ouvert une autre école en ville, dans la rue Pémagnie, ou peut-être dans la rue Bicoquet ou sur Vaucelles.
D'autres documents non moins sérieux, font arriver les frères en 1730, pour ouvrir immédiatement les deux écoles, Saint-Gilles et rue Pémagnie, ou rue Bicoquet, ou rue Vaucelles.
Nous ne sommes pas plus certains sur l'époque de leur départ de Caen pendant la révolution.
D'après une lettre authentique du frère Agathon, que nous possédons les frères se seraient retirés en 1783 ; d'autre part les annales de l'Institut disent qu'en 1790, 5 Frères dirigeaient 4 classes à Caen, avec 289 élèves.
Chapitre deuxième :
1) Retour des Frères à Caen après la Révolution.
Nous sommes mieux renseignés sur le retour des Frères à Caen après la Révolution française.
Le 10 mars 1812, le Conseil municipal émit le vœu : « qu'il soit sollicité un nombre de 8 Frères des écoles Chrétiennes qui, réunis en communauté, envoient chaque jour deux d'entre eux dans chacun des quatre quartiers de la ville à une salle destinée à tenir leur école. »
A la suite de cette délibération, Monsieur Lentaigne de Logivière, Maire, entama des négociations avec le frère Gerbaud, supérieur général de l'Institut, mais elles n'aboutirent qu'en 1814 : trois Frères envoyés de Lyon par le Supérieur Général arrivèrent à Caen le 17 octobre. Logés à l'ancien couvent des Cordeliers ( occupé aujourd'hui par les religieuses Bénédictines de l'adoration perpétuelle du très Saint Sacrement, rue Elie de Beaumont ) ils y firent l'ouverture d'une école de deux classes le 6 décembre 1814.
A peine installés dans leur nouvelle maison, rue de Geôle, ancien Couvent des Bénédictines, les frères se préoccupèrent de se former des aides qui puissent être plus tard leurs successeurs dans l’œuvre de l'éducation chrétienne ; ils y étaient d'ailleurs fortement engagés par leur vénéré Supérieur, qui en 1816, écrivit lui-même à Monsieur le Comte de Vendoeuvre (1) (lettre circulaire du Frère Gerbaud ), successeur de M. de Lentaigne de Logivière, pour le prier d'unir ses efforts à ceux des membres du clergé de la ville et des environs, afin de procurer aux Frères de bons jeunes gens disposés à embrasser leur état, et qu'on leur renverrait après les avoir bien formés.
(1) Monsieur le Comte de Vendoeuvre était le père de Monsieur le Général de Vendoeuvre, qui en 1870 était Colonel du Régiment de Cuirassiers de la fameuse charge de Reischoffen, et le grand-père de monsieur l'abbé Révérony, Vicaire Général de Bayeux, et de son frère le Général Révérony.
(2) Cette Circulaire fut imprimée à Caen, envoyée à tous les Curés du diocèse de Bayeux, et en ballots aux évêques de Coutances et d'Évreux pour leurs Curés.
2) Ouverture du premier Noviciat de Caen. (1817)
Quelques postulants se présentèrent en effet et vers la fin de 1817 on put ouvrir un Noviciat dont la direction fut confiée au distingué Frère Ferréol. Plusieurs municipalités voulurent mème contribuer aux frais de formation de leurs concitoyens entrés au Noviciat. Ainsi la vilie de Bayeux fournit la somme de 1800 francs, Falaise 1500, Avranches 750 et Mortain 500. Les succès de ce Noviciat furent très satisfaisants, et le Frère Ferréol eut la consolation de procurer ainsi à l'Institut un bon nombre de Frères qui en furent l'ornement et la gloire.
Parmi eux citons :
1/ Le Frère Ménigne, fils de Monsieur Letenneur, percepteur à Villers-sur-mer, entré au Noviciat le 29 décembre 1821, y mourut le 20 Juin 1822.
2/ Le Frère Murite décédé a Caen le 27 avril 1825, dans de grands sentiments de piété, à l'âge de 17 ans, pendant qu'il faisait son Noviciat.
3/ Le jeune Pierre Prunier, décédé le 28 décembre 1822, apres six semaines de Noviciat.
4/ Le Frère Ugis, succomba le 22 décembre 182, à l'âge de 25 ans, après sept mois de Noviciat. Il a été un modale parfait de régularité, l’obéissance et de modestie.
5/ Le frère Métrophane, mourut à Rennes, le 12 mars 1830, dans sa 23ème année. Il vit approcher la mort avec un grand calme et un parfait abandon à la volonté de Dieu.
6/ Le Frère Mazorien était animé d'un grand zèle pour l'éducation chrétienne de la jeunesse. Atteint de phytisie pulmonaire il fut envoyé à Alençon, dans sa famille, où il expira un répandant à l'invocation : Vive Jésus dans nos cœurs, que sur son instante prière, ses parents lui suggérèrent au dernier moment. C'était le 29 février 1829, 26ème anniversaire de sa naissance, il regretta vivement de ne pouvoir mourir dans sa communauté au milieu de ses confrères.
7/ Le Frère Mercure, décédé a Angers, en août 1833, à l'âge de 29 ans, dont 11 de communauté, des suites d'un anévrisme au cœur qui le tourmentait depuis deux ans.
8/ Le Frère Mérule mourut à Falaise, le 16 Novembre 1842 à l'âge de 50 ans, dont 21 de communauté et 15 de profession. Sa patience ne se démentit pas pendant les 3 mois qu'il garda le lit ; il ne craignait que de causer trop de peine et d'embarras aux Frères qui le soignaient. Il se prépara avec tout le soin possible à paraître devant Dieu, après avoir demandé pardon aux frères présents, et même par écrit à deux de ses anciens directeurs, disant qu'il avait manqué de simplicité à leur égard, et qu'il n'avait pas été sous leur direction aussi mort à lui mème que le demande la vie religieuse.
9/ Le Frère Manuel, fondateur du pensionnat de Dijon, décédé inopinément à Dôle le 6ème jour de la retraite annuelle de 1856, à l'âge de 59 ans.
10/ Le Frère Ursice, natif de Lisieux, qui se dévoua aux pays de mission et mourut à l'ile Bourbon, en 1845, à l'âge de 48 ans et 11 de professorat.
11/ Le Frère Maximin, qui avait été directeur à Lisieux, puis à Saint-Germain-en-Laye, où il mourut en 1853.
12/ Le Frère Maxence, camarade d'enfance et ami intime au Frère Maximin, avec qui il passa 12 ans à Lisieux et 13 à Saint-Germain, il mourut à la Maison-Mère, en 1856, à 61 ans.
13/ Le Frère Liénard, premier postulant du Noviciat a laissé à Falaise ou il fut 16 ans (1827-1843) Directeur, des souvenirs que plus de 50 années n'ont pu effacer. (Note du Frère Nicolas, directeur à Falaise de 1868 à 1904.) Il mourut aussi a l'infirmerie de Paris en 1863.
14/ Le Frère Menée, Directeur, Visiteur, Fondateur du Pensionnat, du Cours Normal et de l'Institut Agricole de Beauvais, où il décéda le 10 juin 1864, à l’âge de 59 ans.
15/ Le Frère Métrand, directeur à Compiègne de 1829 à 1833, décédé à Caen, le 3 août 1868, à l'âge de 68 ans.
17/ Le Frère Mène décédé à Nantes, en octobre 1873, après avoir donné les meilleurs exemples de piété et de régularité ; il était âgé de 75 ans.
Obligé de nous borner, nous n'en citerons pas d'autres. Cependant le Noviciat ne put se maintenir. Les ressources firent-elles défaut ? Les postulants devinrent-ils plus rares ? Nous ne Savons ; toujours est-il qu'il fut fermé en 1826.
Pendant les dix années de son existence, il avait reçu une centaine de sujets : 29 originaires du diocèse de Coutances ; l9 de celui de Bayeux ; 12 de Quimper ; 7 de Rennes ; 7 d'Alençon et les autres de divers diocèses.
Trois novices et un postulant moururent pendant leur année de probation ; 10 se retirèrent, 10 autres furent remis à leurs familles, ne possédant pas la santé ou les aptitudes suffisantes pour se livrer à l'enseignement ou à la vie religieuse. Le Frere Ferréol fut nommé directeur de la communauté et des écoles de Caen . (Le Frère Ferréol, né d'une famille aisée et véritablement chrétienne, fut dès son enfance l'exemple de sa paroisse par sa modestie angélique, l'innocence de ses mœurs et surtout par son immense charité envers les pauvres. Une âme si pure n'était point faite pour le monde, aussi sollicita-t-il son admission au Noviciat de Lyon.
Les succès qu'il obtint dans les classes qui lui furent confiées le firent juger digne de diriger le Noviciat de Caen (1817-1826). Charge dont il s'acquitta avec grand succès.) Le Noviciat ayant été fermé, il fat chargé de la Communauté des Écoles de la ville, sur ce nouveau théâtre, les vertus du F. Ferréol se montrèrent dans tout leur éclat. Ayant reçu son changement en 1837, une députation du conseil municipal, maire en tête alla le demander au Supérieur Général, mais le F. Ferréol tout en remerciant ses messieurs de leur bienveillance, les pria de ne pas insister et de le laisser aux soins des malades lui venaient de lui être confiés à la Maison-mère. Il mourut à Clermont à l'âge de 71 ans dont quarante de profession.
Chapitre troisième
I - Second Noviciat de Caen (1851)
Le Frère Robustien, directeur de la communauté et des écoles de Caen depuis le 24 juillet 1848, ayant été nommé au commencement de l'année 1851, visiteur du district de la Basse-Normandie, composé des diocèses de Bayeux et de Coutances, compris de prime abord la nécessité d'un recrutement sur place.
Cela paraissait non seulement possible, mais même facile, à cause du grand nombre de vocations religieuses que la Divine Providence y suscitait, surtout dans le département de la Manche au milieu de populations qui avaient conservé vivaces, la foi, les vertus et les pratiques chrétiennes, que les familles se faisaient un pieux devoir de transmettre à leurs enfants comme leur plus précieux héritage.
Cependant, le diocèse de Coutances avait sa Congrégation des Frères des Écoles chrétiennes de la Miséricorde fondé en 1842 par M. Delamarre vicaire général du diocèse, dont la maison-mère et le Noviciat étaient établis à l'ancienne Abbaye de Montebourg, dans l’arrondissement de Valognes. Ces frères se livraient, comme nous, à l'enseignement primaire, mais avec cette nuance que, leurs Constitutions les autorisant à aller à deux ensemble, ils pouvaient etre employés dans les petites paroisses trop pauvres pour se permettre le luxe de trois de nos frères.
Si le Noviciat de Montebourg était presque à l'extrémité nord du diocèse de Coutances, il y avait aussi sur les confins Sud, mais dans l'Orne, l’établissement de Tinchebray, dont le Collège ecclésiastique tenu par des prêtres, jouissait d'une excellence réputation, d'ailleurs bien méritée. Il y avait des Frères formés dans la maison, pour les classes élémentaires du Collège et pour les emplois manuels. (Plus tard, il y eut scission : les Frères s'étant séparés se rattachèrent à Ploërmel et allèrent fonder à Flers une école libre et un pensionnat primaire qui devinrent très prospères ; ils furent fermés par le ministère Combes en 1902 ; le pensionnat fur rouvert par des sécularisés et des laïcs.)
Naturellement, le clergé dirigeait vers Tinchebray et surtout sur Montebourg, les jeunes désireux de se consacrer à l’éducation chrétienne de la jeunesse ; sans contredit, les parents, préféraient également ne pas envoyer leurs enfants trop loin, afin de se réserver la facilité de les visiter plus souvent et de garder l'assurance qu'ils ne seraient jamais trop éloignés d'eux.
Le C.F. Robustien qui était doué d'un jugement droit et d'un sens pratique, comprit immédiatement l'importance qu'il y avait si on voulait s'assurer un recrutement sérieux de fonder un Noviciat dans son district. Il ne manqua pas de faire valoir auprès du T.H. Frère Philippe alors Supérieur Général de l'Institut, toutes les raisons qui militaient en faveur de son œuvre, et il eut le bonheur de le convaincre et d'en obtenir toutes les autorisations nécessaires.
Il fut d'abord question de l'établir à Vire, entre les départements du Calvados, de la Manche et de l'Orne. Mgr l’Évêque de Bayeux du 25 et du 26 du même mois y fait opposition pour des raisons que nous nous abstenons de discuter. Sa Grandeur consent cependant à l'ouverture du dit établissement à Caen où dans les environs. Le Frère Bertin arriva à Vire le 25 et en reparti le 26, à cause des ennuis qui empêchèrent le Noviciat dans cette ville. le Cher Frère Visiteur fit aménager à la maison de Caen, un vaste grenier mansardé où on put installer salle d'exercices, promenoir, lingerie, dortoir, etc...
II - Ouverture du second Noviciat à Caen (1851)
Le 26 février 1851 arrivait à Caen le Frère Bertin, directeur du Noviciat de Paris accompagné de six novices et du Frère Albanus son sous-directeur, qui devait diriger le nouveau Noviciat. ( Le Frère Albanus entra au Noviciat de Paris en 1842, devint professeur à l'école Normale de Rouen, sous-directeur au Noviciat de Paris, puis directeur de celui de Caen, directeur à Mer. En 1863, il reçut l'obédience de visiteur pour aller commencer nos établissements à la République de l'Équateur que l'Institut ouvrait à la sollicitation du Président Garcia Moreno, le futur martyr des Sociétés secrètes.
Le Frère Albanus succomba le 11 mars 1868, à une attaque de typhus à l'âge de 51 ans, dont 20 de profession.)
Le 20 mai, et le ler juin se présentèrent deux jeunes gens, l'un de la Manche, l'autre du Calvados, qui, à leur prise d'habit reçurent les noms de Frère Ambertus et Frère Amasis. Une grande partie de leur vie fut consacrée aux écoles de Caen, où ils ont laissé d’excellent souvenir.
Le Frère Ambertus dirigea en outre nos maisons d'Yvetot, Cherbourg et Caen, rue des Jacobins.
Sept autres postulants se présentèrent avant le fin de l'année ; 10 en 1852 ; 13 en 1853 ; 14 en 1854 ; 21 en 1855 ; 10 en 1856 ; 15 en 1857; l5 en 1858 ; 15 en 1859 ; 11 en 1860 ; 6 en 1861 ; 12 en 1862 ; 15 en l863 ; 15 en 1864 ; 12 en 1865 ; 14 en 1866 ; l2 en 1867 ; 20 en 1868 ; l3 en l869 ; et sept pour les six premiers mois de 1870. Ce lui fait un total de 254 postulants en 20 ans, ou une moyenne de 13 par an.
Les débuts du Noviciat de Caen furent difficiles et laborieux, mais grâce aux bénédictions célestes, aux encouragements et aux secours du ministre de l'instruction publique, qui accorda 1000 fr, du Préfet du Calvados et de la Municipalité de Caen qui lui vota 500 fr, les difficultés de la fondation furent surmontées et le 3 janvier 1855 après le passage rapide de plusieurs directeurs, - les Frères Albanus 1851 ; Calice, 1852 ; Absalon 1854 - le Frère Dionius directeur du Noviciat de Nantes, ayant été appelé à le diriger, par l'esprit d’abnégation et de bienveillance dont il était doué, su bientôt gagner tous les cœurs. Le temps de ses conférences paraissaient toujours trop court, dit un de ses anciens novices, tant nous aimions à l'entendre parler de Dieu et de la vie religieuse. Les jeunes frères qu'il a formé lui ont toujours gardé le meilleur souvenir
Comme pour le premier Noviciat de Caen (1817-1826), ce fut le diocèse de Coutances qui fournit le plus fort contingent de sujets normands. Sur 260 postulants qui s'y présentèrent de 1851 à 1870, le diocèse de Coutances en donna 100, le diocèse de Rouen 62 ; Bayeux n'en compta que 34 ; Séez 10 et Évreux 6 seulement ; les 48 autres venaient de 24 diocèses différents.
Le Frère Robustien se reposait entièrement sur le Frère Dionius pour la formation des novices, mais ni le soin de sa communauté ni celui des autres maisons de son district, ne lui faisaient perdre de vue que, sous le rapport matériel, il en était le seul soutien ; aussi l'on a peine à comprendre comment, avec les faibles ressources mises à sa disposition, il a pu, pendant plus de l5 ans, faire face à ses dépenses et à celles de la communauté qu'il dirigeait, surtout si l'on considère que souvent il recevait des postulants n'ayant pour tout bagage que leur bonne volonté ; le manque de pension ne lui parut jamais un cas d'exclusion quand ceux qu'on lui présentait paraissaient bien disposés et propres à l'Institut.
III - Mort du Frère Robustien. (1867)
Le 21 février 1867, pendant une visite que le Frere Robustien faisait à M. Quenault, sous préfet de Coutances, il fut frappé d'une attaque d'apoplexie, transporté à la communauté il expira quelques heures après. Après un service célébré à Coutances, le corps accompagné par Mgr Bravard et son chapitre pendant l'espace de 2 km pris la direction de Caen, où les obsèques furent célébrées le lendemain. Une foule considérable assistait a la cérémonie ; les abords des rues voisines étaient tellement encombrée que la circulation des voitures y était devenue impossible ; le cortège eut de la peine à se frayer un passage jusqu’à l'église. Ce fut une manifestation solennelle de l'estime publique, un hommage éclatant de reconnaissance rendu à une longue vie de dévouement et d'abnégation. Deux discours furent prononcés sur sa tombe, l'un par M. Théry, recteur de l'Academie de Caen, l'autre par M. Bayeux, premier adjoint, remplaçant M. Bertrand maire de Caen, retenu à Paris par ses devoirs de député. Le Conseil municipal vota la concession perpétuelle d'un terrain au cimetière Saint Pierre pour y déposer la dépouille mortelle du regretté Visiteur. Un modeste monument rappelant sa mémoire y fut élevé par souscription publique.
Pendant que le Frère Robustien était directeur de la Communauté N-D de Versailles (1838-1848) Horace Vernet travaillait à ses belles toiles des Guerres d'Algérie, qui ont à jamais illustré son nom. Il donna également le magnifique tableau représentant le Frère Philippe et il voulut y ajouter le portrait en buste du F. Robustien ; celui-ci crut être très agréable à la ville de Caen en lui offrant pour son musée cette œuvre du grand maître (Supplément du Noviciat p. 8 note D).
Chapitre quatrième
I - District de Normandie (1867)
Le C.F. Cécilien, directeur de l’École Normale de Rouen, Visiteur de la Haute Normandie, et grand ami du F. Robustien, malade depuis fort longtemps, mourut deux jours après lui, et, chose remarquable, les deux confrères furent enterrés le même jour et à la même heure, l'un à Caen, l'autre à Rouen. Devant cette coïncidence le Conseil de Régime décida de réunir les deux petits districts en un seul, qui comprit les départements de Seine-Inférieure, Calvados, Manche, Eure, sous le nom de district de Normandie ou de Caen-Rouen.
Le C.F. Dauphin, Visiteur du district de Paris qui par suite de grandes fatigues venait d’être nommé comme poste de demi-repos à Amiens fut appelé avant d'en avoir pris possession, à l'administration du nouveau district. Le Frère Dionius, Directeur depuis 12 ans du noviciat de Caen, succéda au Frère Robustien, dans la direction de la communauté et des écoles de la ville.
II - Le Frère Baudelin directeur du noviciat (1867)
Le Cher Frère Dionius eut pour successeur dans la direction du Noviciat le Frère Baudelin, ancien professeur au pensionnat de Dreux, qui quoique à peine âgé de 26 ans était sous directeur au noviciat de Paris, mais dont la haute piété et l'esprit religieux avaient attiré l'attention et mérité la pleine confiance des supérieurs ; il avait été pendant plusieurs années le compagnon de classe du Frère Léon de Jésus décédé à Rome le 3 janvier l896 en odeur de sainteté. Nul doute que leurs âmes, à leur contact journalier ne se soient embrassées mutuellement d'amour pour Dieu et de zèle pour les âmes.
Ill - Inconvénients du local du noviciat de la rue de Geôle.
La situation du noviciat dans les mansardes de la maison de Caen, était sujette à trop d'inconvénients pour être définitive. Les chaleurs de l'été y étaient si suffocantes que chaque année on était obligé, pendant les mois de juillet et août, d'envoyer un ou deux novices dans chacune des communautés voisines, au grand avantage de leurs santés, il est vrai, mais au préjudice de leur formation religieuse. Le jardin du noviciat au milieu duquel se trouvait la belle et magnifique statue de Saint Jean-Baptiste de La Salle, copie de celle d'Oliva, sculptée par le jeune Guibout (19 ans) ancien élève de l'école de Vaucelles, semblait présider à tous les exercices qui s'y faisaient ; ce jardin était entouré de hautes maisons à trois et quatre étages, empêchant la libre circulation de l'air et qui, en outre avaient une soixantaine d'ouvertures par lesquelles des personnes de tout âge et de tout sexe, pouvaient regarder, chanter ou parler comme bon leur semblaient. Au rez de chaussée d'une de ces maisons était un restaurant d'où s'échappaient des propos et des chants peu édifiants pour les Novices ; de l'autre côté, une suifferie et une teinturerie envoyaient par leurs ouvertures des vapeurs nauséabondes, qui achevaient de rendre ce jardin inhabitable pour ces jeunes frères. Ajoutons à cela le bruit continuel des marteaux frappant sur l'enclume d'un maréchal-ferrant qui travaillait dimanches et fêtes ; puis le scandale des blasphèmes de ces ouvriers etc... etc...
Les novices étant employés comme c'est l’usage dans nos maisons de formation, à l'entretien de la propreté des appartements et aux travaux de la cuisine, traversaient fréquemment la cour d'une école de six classes et se trouvaient même quelquefois mêlés aux élèves pendant les entrées, les sorties et les récréations. La vue de ces futurs professeurs dans un accoutrement négligé, et employés à de telles besognes, produisaient sur les enfants et sur les parents, une impression si défavorable que, tant que le noviciat est resté dans cette maison, pas un élève n'a sollicité son admission ; le contraire s'est produit quand le Noviciat s'est trouvé dans des conditions différentes. Ainsi lorsque le noviciat a du être licencié par suite de la loi du 7 juillet 1904, sept élèves des écoles de Caen, en faisaient partie. Mais n'anticipons pas .
A son arrivée à Caen, en mai 1867, avec la sûreté de son jugement et son esprit pratique, le F. Dauphin, fut frappé des inconvénients que nous venons de signaler ; il communiqua ses vues au Chers Frères Facile et Agapet, Assistants du District, qui s'en ouvrirent au T.H.F Philippe, lequel en comprit immédiatement toute la gravité et toute l'importance, mais le manque de ressources pécuniaires, obligea à maintenir le statu quo. Au mois de juillet l868, le C.F. Baudelin écrivait au C.F. Visiteur en tournée : « Je suis seul debout avec un novice, pour soigner tous les autres alités avec des symptômes de fièvre typhoïdes. » Sous l'impression de cette triste nouvelle ; le C.F. Visiteur la communiqua Au C.F Agapet en termes très pressants, et sollicita la permission de chercher un local plus salubre. Le conseil de régime accorda aussitôt l'autorisation demandée.
IV - Legs de Madame de Courdemanche, achat du clos de la Mission.
Mais restait toujours la difficulté financière. On ne possédait que quelques économies du digne et très regretté Frère Robustien. La divine Providence, qui voulait cette œuvre, suscita une pieuse bienfaitrice de Lisieux, madame Justine Lebailly, veuve de Charles de Courdemanche, qui, employa une grande partie de sa fortune en bonnes œuvres et notamment en faveur des Frères de Caen et le Lisieux, et qui par son testament du 20 juillet 1868, légua la somme de 25.000 Fr aux Frères des Écoles Chrétiennes à charge de faire dire cent messes par an pendant 5 ans. Un décret de l'empereur Napoléon III en date du 9 juillet 1870, signifié le ler août, autorisa le legs et permit de l’employer à l'acquisition d'une propriété devant être affectée au logement des novices.
On se mit aussitôt en campagne à la recherche d'un immeuble convenable à vendre ; mais les uns étaient trop éloignés de Caen, d'autres paraissant réunir les conditions convenables étaient d'un prix trop élevé. Enfin après bien des démarches, on trouva en janvier 1869, une ferme de deux hectares, entourée de murs, à trois km de Caen, sur le chemin d' Hérouville-Saint-Glair, séparé du canal maritime, par un pré, faisant partie de la propriété. Ayant été mise en vente à l'enchère, le l2 février 1869, elle fut adjugée au prix de 22.000 fr à M. Dayan, homme d'affaires, ancien élève des Frères.
Deux jours après, le F. Dionius, munis des pouvoirs du F. Philippe, Je Supérieur Général, se présenta accompagné de l’adjudicataire pour signer le contrat d'achat. Grand fut l'étonnement de la vendeuse, Madame veuve Lamotte et du notaire Me Lavarde qui ne s'étaient pas doutés qu'ils vendaient aux Frères.
V - Entrée en possession de l’immeuble d'Hérouville.
Mais, aux termes de l'adjudication, on ne pouvait prendre possession de l'immeuble qu'à la Saint-Michel. Moyennant une indemnité de 300 fr à madame Lamotte et une autre de 800 fr à Monsieur Lamotte fils on pu, dès le 15 mai, entrer en jouissance de presque toute la propriété ; on profita de l'été pour approprier les bâtiments à leur nouvelle destination.
Chapitre cinquième
I - Noviciat d'Hérouville.
Trois frères purent s'installer a Hérouville dés le 28 décembre 1869, anniversaire de la naissance du C.F. Dauphin, Visiteur, et présider aux travaux, mais ce fut seulement le 24 juin 1870, que le Noviciat put y être transféré sous la direction du C.F. Baudelin.
Cette propriété, indiquée dans le cadastre et le contrat de vente sous le nom de « Clos des murailles », était connue des habitants de la contrée sous celui de « Clos de la mission », parce qu'avant 1792 c'était la maison de campagne des Missionaires Eudistes qui en étaient possesseurs.
Le plus ancien des bâtiments, situé à droite de la cour st-Joseph, qui a servi de cellier, portait la date de 1609 sur l'une des pierres de la porte d'entrée. Démoli depuis, son emplacement correspond à la sacristie et au chœur de la Chapelle des petits-novices ; aujourd’hui des vieux frères en retraite.
Le hangar servant à remiser les charrettes de la ferme fut approprié en chapelle, à laquelle s'ajoutèrent plus tard, une tribune au fond, et une sacristie en avant, en face le bâtiment Bonaventure dont nous parlons plus loin. Cette chapelle était bien pauvre à tous égards ; c'était une vraie grotte de Bethléem, elle a servi jusqu'à la construction de Notre-Dame de Lourdes.
Si l'habitation manquait de confortable, les Novices pouvaient au moins respirer à plein poumons, l'air pur et bienfaisant de la campagne saturé des parfums de la prairie qui s'étalait à leurs pieds et dont les brouillards humides ne montaient pas jusqu'à eux.
Malgrè cette amélioration matérielle, le recrutement du Noviciat devenait de plus en plus difficile, comme d'ailleurs dans les autres districts.
En 1873, le Frère Albertis de Jésus fut nommé inspecteur public de la commune d'Hérouville, tous les jours accompagné d'un novice il se rendait à sa classe qui servait ainsi d'école d'application pour la maison de formation, malheureusement, le manque de personnel fit abandonner ce poste en 1875.
Le 7 janvier 1874 le Très honoré Frère Philippe succomba à une congestion pulmonaire. Le Frère Jean-Olympe qui lui succéda ne gouverna l'institut que pendant un an.
Le Frère Dauphin, Visiteur provincial, souffrant d'une laryngite chronique, qui lui rendait les examens des classes fort pénibles, dû s'adjoindre pour le suppléer dans cette partie de ses fonctions, le Frère Jéromin qui occupa cette situation d'Octobre 1875 à novembre 1877 ; la fatigue et la maladie l'ayant obligé à se rendre à l'infirmerie de Paris, il eut pour successeur le F. Illan-Joseeh, de Janvier 1878 à oct. 1881. Le F. Alfridien le remplaça jusqu'en avril 1891.
En 1875, le C.F. Bonaventure de Jésus, décédé depuis à la communauté le 21 octobre 1903, ayant fait au Noviciat un don de 5000 fr, on fit construire un petit corps de logis à usage de parloir et salle d’exercices pour les anciens, au rez-de-chaussée, avec cellules au premier. Ce bâtiment se trouve en face St-Joseph, à droite ; le rez-de-chaussée a plusieurs fois changé de destination, à cause de l'augmentation du personnel.
II - Fondation du Petit-Noviciat (1875)
Pendant la vacance du généralat, le 2 juin 1875, la statue du Vénérable J-B de La Salle fut érigée par souscription publique universelle sur la place Saint-Sever à Rouen. Un comité s'était formé à Paris pour recueillir les souscriptions. Le monument élevé, le comité semblait n’avoir plus d'objet ; il allait se dissoudre lorsqu'on pensa qu'il serait regrettable de ne pas utiliser les éléments qu'on avait réunis avec tant d'efforts. C'est alors que se produisit l'idée de développer le recrutement des Frères. Les Petits-Noviciats de Province sont sortis de cette pensée. Des comités d’hommes et de dames se formèrent un peu partout : Caen, Bayeux, Falaise, Vire, Le Havre, eurent les leurs.
Le but des petits-noviciats était de recruter l'Institut, à défaut de jeunes gens de 18 à 25 ans qui ne se présentaient plus, par des enfants de 13 et 14 ans à leur sortie de classe, ayant dans le coeur des germes de vocation religieuse.
Pour loger les premiers Petits-Novices, le Cher Frère Visiteur fit appel à la charité du T.H. Frère Supérieur Général qui lui envoya un secours de 4000 fr avec lesquels on put aménager, dans la grange, une salle de classe au rez de chaussée, un dortoir au premier et un préau couvert dans la cour. Du côté du canal, on établit un jardin planté de tilleuls formant allée, au fond de laquelle fut érigée plus tard la statue de St J-B de La Salle, lorsqu'en 1880, l'école St pierre étant laïcisée, sous un prétexte futile, les Frères durent quitter l'immeuble qu'ils habitaient depuis 1816.
III - Installation de Monsieur l'Aumônier.
A l'arrivée du Noviciat à Hérouville, Monsieur l'abbé Harel fut nommé aumônier ; il avait son logement à Caen, rue Basse ; Monsieur Loiseleur, curé de la paroisse fut pourvu en 1874, d'un vicaire M. Lelièvre, aujourd'hui (1906) chanoine et curé de St Laurent de Bayeux, qui tout en logeant au presbytère, venait dire la Sainte Messe tous les jours à la chapelle de la communauté, y célébrer les offices le dimanche et donner les saluts autorisés sous semaine. Il fut remplacé en 1877 par monsieur l’abbé Auzis. Monsieur le Curé venait uhe fois par semaine entendre les confessions des membres de la communauté. C'était un pis-aller qui ne pouvait se perpétuer, vu la distance de 1500 m du Noviciat à l’Église, mais la maison n'avait pas d'appartement convenable pour le logement d'un aumônier.
Le C.F. Provincial eut encore recours au T.C.F. Irlide, supérieur Général qui n'écoutant que la générosité de son cœur et l’intérêt qu'il portait à ce pauvre Noviciat, donna 10.000 fr au C.F. Dauphin, qu'il venait de nommer Visiteur provincial par obédience du 18 juin 1876. Tout le district fut vivement reconnaissant au Vénéré Supérieur du double bienfait si délicatement accordé.
On s’empressa de construire à l'angle nord de la propriété, un joli presbytère auquel fut adjoint un jardin. Lorsque tout fut prêt Mgr. Hugonin, évêque de Bayeux, nomma M. L'abbé Tanquerel, chapelain et aumônier des frères d'Hérouville. Ce digne et saint prêtre, ancien vicaire d'Isigny, puis chapelain des sœurs du Sacré-Cœur d'Isigny, avait gagné les fièvres de marais si communes dans le pays marécageux. Le traitement auquel il fut soumis, lui conserva la vie, mais amena une cécité presque complète, qui le mis dans l'impossibilité de remplir aucun ministère paroissial. I1 vivait depuis quelque temps retiré dans sa famille lorsqu'il reçut sa nomination. Son infirmité était grandement compensée par ses éminentes qualités d'esprit et de cœur et par la sainteté et l'austérité de la vie ; aussi depuis plus de trente ans que nous le possédons, nous pouvons affirmer qu'il a rendu à la communauté et au nombreux personnel dont il a eu à diriger la conscience, les services les plus inappréciables.
Chapitre sixième.
I - Fondation de la Chapelle à N-D de Lourdes 1879
On était à peu près logé, mais la chapelle était la partie du local la plus défectueuse. Le Cher Frère Provincial en gémissait devant Notre-Seigneur, mais il ne voyait aucun moyen de remédier à cet état de choses, à moins disait-il à son secrétaire dans les premiers jours de mars l878, que la divine Providence ne suscite une âme généreuse qui nous donne une trentaine de mille francs.
Vers le 15 mars, Monsieur Jules Dubosq, négociant à Rouen, ayant appris par le frère Marcellien, ce besoin de notre Noviciat, et ayant d'ailleurs depuis quelque temps, promis à Notre-Dame de Lourdes qui avait guéri Madame Dubosq, de bâtir une chapelle en son honneur, attendait que l'Immaculée Conception lui fît connaître le lieu de son choix, crut reconnaître l’indication attendue ; il chargea le F. Marcellien d'informer le C.F. Provincial qu'il mettait à sa disposition la somme de 50.000 Fr, et plus si c'est nécessaire. Le choix de Notre-Dame lui était d'autant plus agréable que sa famille est originaire de la paroisse d'Hérouvillette, située à quelques kilomètres d'Hérouville.
Des plans furent immédiatement dressés par Monsieur Hébert architecte à Caen, ancien élève de notre école Saint-Étienne ; Monsieur Dubosq les ayant reçus avec les devis, approuva le tout et désira que les travaux fussent immédiatement commencés ; toutefois ayant émis l'espérance que des pèlerinages viendraient honorer et invoquer Marie dans cette chapelle, il fallut la placer de façon à en rendre l'accès facile au public sans toutefois qu'il put pénétrer dans l’établissement. Mais il fut bientôt reconnu que ce but ne serait atteint qu'en établissant la construction dans le clos voisin adjacent au sud-ouest. Cette difficulté n’arrêta pas M. Dubosq, qui fit au prix de 22.000 fr l'acquisition de cette propriété des jeunes Lepelletier de Caen, qui avaient pour tuteur leur oncle Bazin, alors président régional des conférences Saint-Vincent de Paul, pour le Calvados , la Manche et l'Orne. le contrat fut passé au nom du T.C.F. Joseph, notre Assistant, et de trois autres membres du Régime, au mois d’octobre 1878. En 1892, cette propriété fut vendue à la Société Immobilière l'Avenir.
Le désir de M. Dubosq, de voir la chapelle fréquentée par des pèlerinages imposa la nécessité d'avoir une chapelle souterraine ou crypte (nouveau trait de ressemblance avec Lourdes), afin que la communauté put vaquer à ses exercices religieux lorsque la Chapelle serait occupée par les pèlerins.
II - Construction de la Chapelle.
Les travaux d'excavation commencés le mercredi des cendres 26 février 1879, furent poussés avec activité, la crypte fut creusée dans le roc, ce qui fournit tout les moellons employés dans l'intérieur de la construction, l'extérieur est en pierre de taille d'Allemagne. (Ancien nom de Fleury-sur-Orne.)
La première pierre fut posée sans cérémonie, le samedi 24 mai, fête de Notre-Dame Auxiliatrice ; elle mesure presque 1 m3, et est située à l'angle extérieur (côté du chœur) du transept, chapelle du Sacré-Coeur.
Le gracieux monument et son élégante flèche, s'élevèrent rapidement et le 5 novembre 1880, premier vendredi du mois, fut placée la belle croix artistiquement ouvragée (toujours copie de Lourdes) qui couronne l'édifice.
Les travaux de ravalement tant intérieurs qu’extérieurs, la construction des voûtes, la pose des parquets, etc, tout ces travaux demandèrent encore de longs mois ; lorsque tout fut terminé le C.F. Dauphin, Visiteur provincial, obtint de Mgr l’Évêque de Bayeux, la consécration solennelle du monument.
III - Consécration solennelle de la chapelle (1882)
La consécration solennelle de la chapelle fut faite par Mgr. Lecoq, évêque de Nantes, ancien curé doyen de Saint Jean de Caen, remplaçant Mgr. Hugonin, de Bayeux, en saison à Vichy : elle eut lieu le 23 juillet 1882, fête de Saint Apollinaire. Le procès verbal de cette imposante cérémonie fut dressé par M. le chanoine Jules Hugonin, secrétaire général de l’évêché de Bayeux, frère de Monseigneur. Monsieur l'abbé Heurtin, secrétaire général de l’Évêché de Nantes, célébra la première messe solennelle au maître-autel, nouvellement consacré et sa Grandeur adressa aux assistants une allocution pleine d'onction et d'à-propos, avec une grâce charmante qui les impressionna vivement.
M. Jules Dubosq, fondateur de ce beau monument élevé à la gloire de Marie Immaculée, avait bien entendu, sa place marquée dans cette cérémonie ; il y assista avec plusieurs membres de sa famille. Sa modestie lui aurait fait presque garder l'incognito, et sa présence serait peut-être passée inaperçue, si le Très Honoré Frère Irlide, Supérieur Général, venu exprès de Paris avec le T.C.F. Joseph, Assistant, ne lui eût donné place à ses côtés pendant tout l'office.
Au dîner qui suivit la cérémonie, le T.C.F. Supérieur témoigna en termes élevés la vive gratitude de notre Congrégation au Fondateur de ce superbe monument, élevé avec tant de générosité, en l'honneur de l'Immaculée Conception, envers laquelle notre cher Institut à toujours eu une si grande dévotion.
Mgr. Lecoq, prenant alors la parole, exprima en un langage d'une merveilleuse distinction, combien il était heureux de la délégation qui lui avait été faite et qui lui a procuré à lui, enfant de la Normandie, l'honneur et le bonheur de consacrer à Dieu le premier sanctuaire élevé dans cette province à la Vierge des Roches Massabielles.
Toutes les personnes qui assistèrent à cette fête, en particulier M. Hébert, architecte, M. Hamon, médecin du Noviciat, à qui il donne ses soins gratuitement, plusieurs personnes notables de Caen et des environs ainsi que la plupart des Frères directeurs du district, réunis la veille pour le Chapitre des Voeux, tous donc emportèrent de la cérémonie la plus religieuse émotion et en garderont le plus touchant souvenir.
A partir du premier exercice qui se fit à la chapelle après la Consécration, le Frère Irlide fit précéder le signal de la communauté : « Vive Jésus dans nos cœurs », de cette invocation : « Notre Dame de Lourdes, Immaculée Marie, priez pour nous qui avons recours à vous. » Cet usage s'est maintenu fort longtemps, au moins jusqu'à la mort du Frère Provincial (1893)
Jusqu'à la même époque s'est pratiquée aussi la coutume de lire à haute voix, tous les dimanches entre vêpres et complies, les demandes de suffrages faites pendant la semaine précédente, et à ces intentions, la récitation après le salut, des litanies de N-D de Lourdes. Nous ne savons pour quelles raisons ces deux coutumes n'ont pas été maintenues.
IV - Construction de la grotte.
Le fac-similé de N-D de Lourdes aurait été incomplet, si la Grotte avec sa source miraculeuse n'avait pas été représentée.
Pendant la construction de la Chapelle, le Très Honoré Frère Irlide eut la délicate attention d'envoyer le vénéré Frère Provincial faire le pèlerinage de Lourdes. Le Frère Dauphin en profita pour satisfaire d'abord sa dévotion envers Marie Immaculée et puis pour bien observer toutes choses afin de donner au Petit-Lourdes, comme on l'appelle dans le pays, la plus parfaite ressemblance avec sa mère. Il fît un dessin très exact et très détaillé de la Grotte qu'il se hâta de reproduire à son retour avec de la terre glaise. Peu après, les travaux d'excavation furent commencés, mais le manque de fonds obligea à les interrompre.
Après avoir beaucoup prié l'Immaculée Conception de terminer l’œuvre, il engagea le Frère Marcellien (cf. notice sur le Frère Marcellien...) à trouver une âme généreuse pour fournir les fonds nécessaires à l'achèvement de ce travail important.
La divine Providence suscita mademoiselle Frémont de Rouen, qui donna la plus grosse partie de la somme, Monsieur l'abbé Théodore Garnier, aumônier du Pensionnat Saint-Joseph à Caen trouva le reste dans cette ville. Ce fut aussi par son intermédiaire que Monsieur Bellenger (M. Georges Abel Bellenger, propriétaire, ancien notaire mourut à Caen le 24 octobre 1904 à l'âge du 72 ans. "C'était un homme rempli de bon sens et d'une honnêteté scrupuleuse, de bons et prudents conseils." - Moniteur du Calvados du 26 octobre 1904 – Fort dévot à Notre-Dame de Lourdes, dont il faisait tous les ans le pèlerinage, y passant plusieurs semaines.
Monsieur Bellenger fit don de la statue qui décore la grotte ; celle-ci fut exécutée d'après la maquette qu'en avait faite le Frère Provincial ; elle a avec l'original une ressemblance frappante à laquelle se plaisent à rendre hommage tous ceux qui ont fait le pèlerinage de Lourdes.
Seulement à Hérouville, la Chapelle n'a que 28 m. de long tandis qu'à Lourdes elle a 42 mètres. Donc la fille est un tiers plus petite que la mère ; il en est de même du clocher et de la croix qui surmonte la flèche ; la grotte est dans les mêmes proportions. Ajoutons qu'à Hérouville la chapelle ne contient que la grande nef ; on n'a pas senti la nécessité des nefs latérales ; mais deux chapelles formant transept, consacrées l'une au Sacré-Cœur et l'autre à Saint Jean-Baptiste de La Salle, complètent le monument, avec cinq beaux vitraux ornant le sanctuaire et reproduisant les scènes de l'Apparition, offerts par les amis de l'Institut.
V - Bénédiction de la Statue de la Grotte (1883)
Le jeudi 27 septembre 1883 à la demande de Monsieur l'abbé Tanquerel et du Frère Provincial, Monsieur l'abbé Delalande, curé doyen de Saint Jean de Caen dans le canton duquel est situé la paroisse d'Hérouville, voulu bien procéder à la bénédiction de la statue de la grotte, ainsi que de la fontaine, que pour compléter la similitude, la bonne Notre-Dame a laissé jaillir au fond de notre grotte. Les pieux pèlerins ne manquent pas de boire de cette eau et d'en emporter dans leurs maisons, plusieurs prétendent avoir obtenu par cette eau de nombreuses faveurs. La Communauté tout entière et une nombreuse députation des élèves de nos écoles de Caen assistèrent avec leurs maîtres à la cérémonie.
Après le chant du cantique des pèlerins, Monsieur le doyen dans son allocution bien sentie, montra combien cette reproduction si fidèlement remarquable de la basilique, du clocher, de la Grotte, de la fontaine, etc... serait une précieuse consolation pour les pieux fidèles qui ne peuvent se transporter au sanctuaire béni des Pyrénées.
« Je suis persuadé, disait-il, que la Vierge Immaculée, qui s'est montrée à la petite Bernadette, agréera les prières qui lui seront adressée en ce lieu. C'est un grand bonheur pour moi, ajouta-t-il, d'avoir été appelé à bénir cette imitation de la Grotte où l'Immaculée Conception a daigné poser son pied tant de fois et nous inviter par son exemple, par ses conseils et par ses miracles, à prier pour la conversion des pécheurs. »
Les prières liturgiques de la bénédiction furent suivies du chant du Magnificat pendant lequel la procession remonta à la chapelle pour recevoir la bénédiction du Très Saint Sacrement.
VI- Formation des lacets.
Beaucoup de pèlerins venaient satisfaire leur dévotion à l'Immaculée Condeption ; mais l'espace manquait au pied de la grotte pour pouvoir y réunir un nombre quelque peu considérable de personnes. On aurait bien voulu ouvrir les flancs de la colline, mais c'était un grand travail demandant une dépense considérable ; et, si on voulait imiter les cérémonies de Lourdes, il fallait tracer au milieu des rochers ce qu'on appelle les lacets. C'est un sentier, partant de la Grotte, suivant en zigzag le flanc de la montagne pour aboutir à l'entrée de la basilique et formant en développement un M immense où se déroulait à cette époque la procession aux flambeaux. Le pieux et généreux fondateur du sanctuaire, M. Jules Dubosq voulut bien assurer les fonds de cette dépense dont le devis dépassait 20.000 fr.
Pendant tout un hiver, une vingtaine d'ouvriers habitués aux travaux de carrière et de terrassement y furent occupés de sorte qu'au printemps de 1885, le mois de Marie put être inauguré par une procession dans les lacets et donna le splendide spectacle d'un M vivant et flamboyant de 170 mètres de développement.
Dans le courant de cette année, plus de 12.000 personnes, vinrent visiter le sanctuaire et ses dépendances ; plusieurs paroisses y firent un pèlerinage présidé par leur clergé.
Sans doute des curieux et des touristes se mêlèrent parfois aux pèlerins, mais par la suite ces derniers formèrent l'immense majorité des visiteurs. Les élèves du Pensionnat Saint-Joseph, en mai, et ceux des Écoles libres après la Première Communions, prirent la pieuse habitude de faire en corps, leur pèlerinage annuel.
Un grand nombre d'ex-voto déposés soit dans la chapelle soit à la Grotte témoignent hautement des faveurs obtenues en, ce lieu, visiblement choisi par l'Immaculée Marie pour dédommager ceux de ses serviteurs que leurs occupations ou la modicité cl leurs ressources privent du pèlerinage pyrénéen. Nous pouvons ajouter que cette pensée est entrée dans les motifs qui ont déterminé M. Dubosq à faire cette splendide fondation.
VII- Isolement complet de la Propriété.
Par l'achat de la propriété Lepelletier, nous nous trouvions placés entre trois chemins ; mais au Nord-est, une petite ferme faisait pointe sur notre terrain ; et les croisées de l'habitation du fermier avaient vue directe sur nous ; c'était fort gênant pour le présent et pouvait le devenir bien davantage dans l'avenir, si, les pèlerinages se multipliant, on transformait cette ferme en auberge, café, restaurant, etc... Frappé de la gravité de ces inconvénients le T.C.F. Irlide autorisa l'acquisition de ce terrain et le contrat d'achat fut passé par les mêmes Assistants tontiniers de la propriété achetée par V. Dubosq ; toutefois le paiement s'en fit par quelques économies de la maison, (Cette propriété comme celle achetée par M. Dubosq fut vendue en 1892, à la Société Immobilière l'Avenir) et les offrandes des Communautés du district. Ce complément porte à 4 hectares la contenance de la propriété close de murs entre quatre chemins, complètement isolée et à l'abri de tout voisinage direct.
VII bis - Construction du Petit-Noviciat.
Le nombre des petits-novices qui était de 13 en 1881, de 18 en 1882, de 24 en 1883, était monté à 45 en 1884, puis à 56 en 1885 et enfin à 59 en 1886 ; on fut obligé d'établir des dortoirs dans des bâtiments séparés ce qui rendait la surveillance très difficile sinon impossible.
Le T.C. Frère Joseph Assistant du district pour lequel il avait toujours gardé une paternelle affection ayant été élu Supérieur Général en 1884 à la mort du Frère Irlide, prêta une grande attention aux observations que lui fit à ce sujet le Frère Cyrus, son successeur, et appuya ses instances auprès du Conseil du Règime qu'il voulu bien autoriser les constructions nécessaires pour remédier à ses inconvénients.
Les travaux cormenerent dès les premiers jours de juin 1886. Un bâtiment de 46 m. de long, entre deux cours, avec préaux couverts fut construit pour le Petit-Noviciat dans la partie Nord-Est de l'enclos : classes au rez-de-chaussée, vastes dortoirs avec lavabos au premier.
VIII - Création du Scolasticat. (1886)
La loi de 1850 sur l’enseignement primaire exigeait le Brevet de Capacité pour tout directeur d’École primaire. Mais le Gouvernement, qui avait à sa disposition les Écoles Normales alimentées par le budget de l’État, se préparait lentement mais sûrement, à l'exiger de tous les instituteurs adjoints dans les écoles libres, dès qu'il serait en mesure de ne placer lui-même dans écoles publiques que des adjoints munis de ce diplôme, délivré par ses commissions. On croyait avoir enfin trouver la massue qui devait détruire toutes les écoles congréganistes. Les Supérieurs de l'Institut connaissant bien ces tendances ne perdaient aucune occasions d'exciter et d'encourager les Frères à un travail sérieux en vue d'obtenir le Brevet do Capacité. Dans le district de Normandie en particulier, des examens trimestriels contrôlaient ces études ; mais les Frères étant obligés de faire la classe, toute la journée, avaient fort peu de temps à leur disposition et le manque de personnel et de ressources pécuniaires nous mis dans l'impossibilité d'établir des écoles normales.
Cependant en 1880 le C.F. Dauphin, Provincial put procurer à 6 Frères de classe déjà âgés quelques mois de séjour à Hérouville. Ce fut l'embryon du Scolasticat. Ces Frères, pleins de bonne volonté et de reconnaissance pour l'Institut s'adonnèrent avec tant d'ardeur à ce travail que quelques semaines avant les examens, il fallut les envoyer dans les communautés pour ne pas les voir tomber malades. Ceux qui ne réussirent pas à la Session de juillet se trouvèrent en mesure, tout en ayant repris le soin d'une classe, d'obtenir un succès plus ou moins retardés. Cet essai fut renouvelé l'année suivante et obtint le même succès.
Le gouvernement étant prêt fit voter la loi du 16 juin 1881 qui rendait le Brevet obligatoire pour tous les instituteurs adjoints, au mois d'octobre 1884.
Pendant les trois années de transition, de nouveaux efforts furent réalisés pour faire breveter tous les Frères en exercices et qui pour la plupart réussirent à se mettre en règle avec la loi. En vue d'économiser le personnel enseignant de nos Scolasticats, les élèves de celui de St Omer furent réunis à ceux d'Hérouville pendant l'année scolaire 1884-1885 ; l'année suivante ceux d'Hérouville se rendirent à St Omer, mais les frais de voyage étant considérables et le Scolasticat d'Hérouville étant aménagé en 1886, chacun resta chez soi.
Mais les jeunes frères sortant du noviciat ne pouvaient être chargés d'une classe que lorsqu'ils étaient pourvus de leur diplôme. Il devint donc absolument nécessaire d’établir dans les maisons de formation , un scolasticat où les jeunes Frères, après leur année de grand noviciat, viendraient se préparer aux examens ; ce fut le complément de la formation.
Dans la partie sud-ouest, l'ancien bâtiment de le ferme Lepeltier, fut surélevé d'un étage, ce qui permis d'établir des classes au rez-de-chaussée et un dortoir au premier pour loger les scolastiques. Un promenoir couvert et fermé de 37 m. de long, avec ouvertures ogivales dans le style de la chapelle complète ce service. Le 14 décembre 1886, le T.C.F. Joseph, accompagné des CC.FF. Cyrus et Osée, Assistants, vint inaugurer les locaux du scolastiquat, et ceux du petit-noviciat.
Il est plus facile de comprendre que de décrire le bonheur dont tous les cœurs furent inondés en cette fête des Noviciats présidée par le Très sympathique Supérieur et honorée de la présence de deux de ses Assistants. La fête religieuse fut aussi solennelle que le permirent les modestes moyens de la communauté et le talent des chanteurs et des artistes. M. l'abbé Lucas, curé doyen d'Isigny, dont M. l’aumônier avait été le vicaire, célébra la grand'messe, assisté de trois autres prêtres. Entre vêpres et complies, un Père Eudiste aumônier du Couvent de la Charité de Caen, fondé par le Vénérable Père Eudes, donna un très beau sermon, et, après le Salut solennel du T.S. Sacrement, le Supérieur Général prononça l'acte de consécration de l'Institut et de la communauté à l’Immaculée Conception. Vers 8 heures du soir la procession aux flambeaux se dirigea vers la grotte, en défilant par les lacets où elle forma comme à Lourdes un M gigantesque de lumière mouvante.
Le lendemain jeudi, les Frères des communautés de Caen, se réunirent au pensionnat St-Joseph, pour présenter leurs respectueux hommages au T.H.F Supérieur, qui eut la délicate attention de ne pas vouloir repartir sans les recevoir tous et leur donner ainsi une nouvelle marque de sa paternelle affection.
Au mois de septembre précédent, le Frère Adelphin, avait été nommé directeur du nouveau Scolasticat. C'était un sujet très distingué excellent professeur, qui avait fait ses preuves, tant à l'école normale de Rouen(1865-1867), alors confiée à nos frères, qu'au pensionat de Beauvais (1867-1871) et de Rouen, qu'à l'école militaire de Rambouillet (1876-1878) qu'il avait dirigé avec grand succès. Sa passion pour l'étude qui lui faisait oublier le sommeil et la nourriture, n'avait d'égal que son dévouement à toute épreuve pour les jeunes Frères qui lui furent confiés et qu'il devait former au triple point de vue physique, intellectuel et religieux. Il fut pour eux un vrai père, aussi la plupart ont ils conservé de lui le meilleur souvenir et ont entretenu des rapports suivis avec leur ancien directeur.
Vers cette époque, M. Jules Dubosq voulant donner à la chapelle un dernier trait de ressemblance avec Lourdes, y fit placer les 15 mystères du Rosaire que l'on serait tenter de confondre avec les stations du chemin de la Croix installé à la crypte. D'ailleurs quelques uns des tableaux sont communs aux deux dévotions.
Pendant deux ans, rien d'extraordinaire ne vint troubler la vie calme, paisible et laborieuse des habitants d'Hérouville. Le personnel du scolasticat, des grand et petit noviciats s'augmentait progressivement, sous les auspices de la Vierge Immaculée, et le T.C.F Provinciale voyait ainsi se vérifier cette parole de foi ardente qu'il avait dite, quelques années auparavant à son secrétaire : « Si Notre-Dame s'est bâtie ici un palais, ce n’est pas pour y rester toute seule, mais pour y attirer un grand nombre de serviteurs dévoués. »
Nous nous reprocherions de passer sous silence la perte réelle que fit la communauté le 5 mai 1888, en la personne du C.F. Aventor-Louis qui, après avoir consacré de longues années de dévouement à l’orphelinat Leveneur, se présenta, à l'âge de 50 ans, au Noviciat d'Hérouville dont il suivit les divers exercices avec une simplicité enfantine, et une scrupuleuse fidélité. Après son année d'épreuve il fut attaché à la maison où il exerça successivement ou simultanément, les fonctions de portier, tailleur, linges , sacristain, infirmier. Son activité suffisait à tout et sa piété ne souffrait jamais de ce travail parfois considérable, auquel il joignait des mortifications corporelles et une sobriété excessive dans la nourriture. En 1881 il demeura enfermé pendant plus de six semaines avec des varioleux qu'il avait fallu isoler. Une bronchite chronique que rien ne put arrêter le conduisit au tombeau à l'âge de 66 aans, dix de profession.
IX - Départ du Frère Baudelin (1888)
Le 28 novembre 1888, le C.F. Baudelin, directeur du grand et du petit noviciats, fut appelé par la confiance du T.C.F. Joseph qui avait su l’apprécier, à la direction du grand noviciat de Paris.
Par suite de l’exiguïté dos locaux et aussi pour ménager et diminuer le personnel dirigeant, une entente fut établie avec Notre Dame du Rancher, maison de formation du district du Mans, pour fusionner momentanément les deux communautés. Le grand noviciat d'Hérouville sous la conduite du Frère Brice-Clément, sous directeur, se transporta au Rancher, et le Scolasticat du Rancher vint se réunir à celui d'Hérouville.
Le Frère Antonin-François fut nommé directeur du Petit-Noviciat d'Hérouville où depuis quelques années il était un des principaux professeurs.
X - Établissement d'un cimetière.
Le T.C.F. Provincial voulut que rien ne manqua à sa maison de format:on. Son grand désir était, non seulement d'y finir ses jours mais encore, d'y dormir après sa mort son dernier sommeil en attendant la résurrection générale, c'est pourquoi après avoir fait consulté à Caen un avocat pour connaître les lois qui régissaient la matière et appris de lui que tout individu peut sur sa demande ou celle de ses amis se faire enterrer sur sa propriété, et s'être assuré l'assentiment de Monsieur le Maire, qui l'accorda très aimablement, d'autant plus volontiers que le cimetière de la commune d'Hérouville était insuffisant ; le Frère Provincial, dis-je, fit préparer à l'angle sud-ouest de la propriété et à plus de 60 m. des bâtiments d'habitation une portion de terrain destinée à la sépulture des membres de la communauté. Un élégant berceau de charmille y conduit, au milieu d'une belle plantation de tilleuls formant rond-point, il fit ériger sur piédestal en granit un magnifique groupe en fonte offert par le T.H.F. Joseph et représentant le T.S.Vierge Marie, abîmée dans son inénarrable douleur, recevant au pied de la Croix, d'où il venait d'être détaché, le corps inanimé de son divin Fils. C'est au pied de ce groupe qu'il désirait être inhumé et où il repose comme nous le dirons plus loin. Après lui 18 Frères, grands et petits novices, membres de la communauté sont venus prendre place à ses cotés dans cette nécropole familiale ; depuis un certain Monsieur Tourmente, membre du Conseil Municipal de la commune d'Hérouville, mal disposé pour la communauté des Frères, qu'il croyait à tort ou à raison, n'avoir pas voter pour lui aux élections municipales de 1900, fit supprimer par le Juif Handlé, secrétaire général de la préfecture du Calvados, pendant une absence du Préfet, ce privilège bien inoffensif cependant de l'inhumation privée.
Vers la même époque, le C.F. Provincial avait aussi obtenu du T.H.F. Joseph, l'érection d'un kiosque devant la grotte de Notre-Dame de Lourdes, pour abriter les pèlerins contre les intempéries des saisons et leut permettre de placer des ex-voto en témoignage de leur reconnaissance. Malheureusement ce petit monument, véritable œuvre artistique masque le coup d'oeil et depuis plusieurs années il est question de le transporter un peu plus haut, où il rendra sans aucun inconvénient, le même service. Le malheur des temps a fait ajourner le projet.
La fusion des deux maisons de formation d'Hérouville n'était que provisoire, aussi le 29 septembre 1892, chaque communauté reprit son autonomie et le F. Brice-Clément fut nommé Directeur du grand noviciat d'Hérouville avec le F. Aulaire Pascal pour sous-directeur.
XI - Mort du Frère Dauphin (1893)
Le jeudi 1er juin, le T.C.F. Dauphin Visiteur Provincial, fondateur de l'établissement d'Hérouville succombait à une attaque de paralysie du côté droit, dont il avait été atteint le samedi précédent en se levant.
Né le 28 décembre 1810, d'un de ces héros de la Vendée qui s'étaient condamnés aux plus durs sacrifices pour la défense de la religion. A peine âgé de 24 ans en 1834, il entra au noviciat de Nantes ; nommé Directeur aux Sables-d'Olonne avant d'avoir fait sa profession, transféré à Soissons, puis à Rouen ; nommé directeur du pensionnat de Londres ; il reçut en 1858 l'obédience de Visiteur de Paris. Il organisa dans nos écoles, de concert avec le cher frère Angelum directeur à St Nicolas des champs, les concours mensuels qui devaient préparer les élèves des Frères à se que la Ville de Paris avait établi à la fin de l'année scolaire entre les écoles congréganistes et les écoles laïques, dont les résultats, montrèrent aux plus prévenus la supériorité de la méthode simultanée, conservée par les Frères, sur le mode mutuel importé d'Angleterre que suivaient les écolrs laïques et qu'encourageaient les administrations publiques avec les ressources dont elles disposaient.
Les succès des Frères furent tels que la Ville de Paris renonça officiellement au système tant préconisé pendant trente ans pour adopter le nôtre que nous avions gardé envers et contre tout et tous. Voici un aperçu des résultats : 893 bourses furent mises au concours en 23 ans. Les élèves des Frères en remportèrent 743 ; les écoles laïques 150. Sur 23 concours, les écoles des Frères remportèrent la 1ère place 20 fois ; la 2ème , 22 fois; la 3ème, 20 fois; la quatrième,18 fois; la 5°, 19 fois ; la 6° , 23 fois, la 7°, 17 fois; la 8°, 18 fois; la 9°, 18 fois ; la 10°, 22 fois.
Le Cher Frère Dauphin avait établi parmi les vieillards, alors nombreux à la maison-mère, qu'il appelait les Invalides ou Vétérans du Sacré-Cœur de Jésus ainsi que parmi les infimes appelés les plus chers amis du divin Cœur, l’intercession perpétuelle ; il voulait que chacun se considérât comme un autre Moïse, dont les mains devaient se tenir élevées et suppliantes sur la montagne, tandis que les jeunes et les vaillants d’Israël combattaient dans la plaine.
Après 9 ans de ce laborieux apostolat dans la Capitale, le Frère Dauphin se trouva si épuisé que les Supérieurs le nommèrent comme poste de demi-repos, Visiteur du petit district d'Amiens, qu'il avait créé 15 ans auparavant, avant d'aller à Londres ; mais avant qu'il en eut pris possession, les deux frères Robustien et Cécilien, Visiteurs de Rouen et de Caen, étant morts presqu'en même temps (leurs obsèques eurent lieu à Rouen et à Caen, le lundi 25 février à 10 heures) le conseil du Régime décida la réunion des deux districts en un seul, sous l'administration du Frère Dauphin.
La charge était lourde mais le Frère Dauphin...
TABLE DES MATIERES
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Chap. I Les Frères à Caen avant la Révolution
Il I Retour des Frères à Caen après la Révolution (1814)
II Ouverture du ler noviciat de Caen (1817)
III I Second noviciat de Caen (1851)
II Ouverture de ce second noviciat
III Mort du Frère Robustien (1867)
IV I District de Normandie (1867)
II Le Frère Baudelin, directeur du noviciat (1867)
III Inconvénients du local du noviciat, rue de Geôle
IV Leg de Mme de Coudemancbe, achat de la mission
V Entrée en possession de l'immeuble d'Hérouville
V I Noviciat d'Hérouville
II Fondation du petit noviciat
III Installation de M. l'aumônier.
VI I Fondation de la chapelle à notre-Dame de Lourdes (1879)
II Construction d e la chapelle (1879)
III Consécration solennelle de la chapelle (1882)
IV Construction de la Grotte
V Bénédiction de la statue de la grotte (1883)
VI Formation des lacets
VII Isolement complet de la propriété
VII bis Construction du petit-noviciat
VIII Création du scolasticat (1886)
IX Départ du Frère Baudelin (1888)
X Établissement du cimetière
XI Mort du C.F. Dauphin (1893)
Notes dactylographiées conservées aux archives Lassaliennes à Lyon ( http://lasallefrance.fr/archives-lasalliennes-de-france-a-lyon/)